Dimanche 5 septembre 2021


Les hytters ronflent impassibles

La place est frappée de bercement

Seul en tente du campement

Titine est là fidèle et paisible


Il est cinq heures

Mes sens s'éveillent

Mon esprit s'éveille


Le sommeil a été de qualité

Nuit sans humidité ni rosée

Mon couchage va se ranger

Et ma tente se replier


Il est cinq heures (et demi)

Le café m'a réveillé

Place au petit-déjeuner

La lumière est inchangée

L'horloge a-t-elle tourné ?


Il est 5 heures (cinquante huit)

Le flat s'éveille

Titine s'éveille


Les valises sont remplies

Le Topcase aussi

Le pilote a fait pipi

Alors c'est parti mon kiki


Il est 5 heures (cinquante neuf)

Je n'ai pas sommeil



Voilà quelques mois, l'idée de me rendre en Scandinavie ne m'avait même pas effleuré l'esprit, et me voici proche de la fin de la terre nordique là où l'eau tombe dans le vide galactique.


Le monde n'est pas dans les cartes et les livres, ni dans les BDs d'Uderzo et Goscinny.

Il est là dehors, au-delà des Alpilles, entre les garnisons romaines de St Rémy de Provence et le bout du pizza-monde.

NDLR : il y a de jolis vestiges romains à St Rémy.


Aujourd'hui, je piaffe de joie à l'idée de découvrir ce qu'il y a au-delà des frontières du comté du Finnmark.

Moi aussi j'aurai quelques histoires à raconter lorsque je reviendrai, si jamais je tombe pas dans le vide.


En chemin, je tombe sur l'animal emblématique du coin, les rennes.

Lors des premières rencontres, j'ai manqué de temps pour les prendre en photo correctement. Ça reste pas en place ces bestioles. Avec leur allure clownesque et leur démarche un peu nonchalante, c'est à se demander s'ils n'abusent pas de l'aquavit.


Mais la persévérance de ces cervidés à vouloir me traverser sous les roues m'aura permis au moins de les immortaliser sur CMOS.


Petit aparté animalier

Amha, le renne est un croisement chelou entre un bison du Yellowstone et un wallabie.

T'es tout content de voir les premiers spécimens, alors tu t'arrêtes à chaque fois, alors qu'au final il y en a partout.

Le bison reste au milieu de la route, c'est à toi de bouger. Si tu vas le voir à pied, il vient te voir aussi avec son air un peu benêt et ça fait flipper. J'ai testé et ce n'était pas une bonne idée. Heureusement qu'il y avait la moto.


Le wallabie, quant à lui, a un aspect tout mignon.

L'envie de lui faire un câlin est bien plus prégnante qu'avec un bison.

Le wallabie a lui aussi des penchants affectueux, le poussant à aller avec élan vers autrui.

D'autres observateurs avisés pencheraient pour une tendance suicidaire, vu l'entrain débordant qu'il met à traverser juste à notre arrivée... attendant au bord de la route comme certains attendent au bord d'un quai de gare.


Quelle tristesse ce fut d'en avoir écrabouillé un, en van, de nuit en Tasmanie. J'avais pourtant réussi à éviter une bonne dizaine de ces congénères juste avant. Quelle déprime. Pauvre bête.


Donc pour résumer le renne :

  • il peut se trouver au milieu de la route. Dans ce cas, il attend que tu arrives presque à son niveau pour bouger et généralement gambader en zig-zag devant toi au milieu de la route.
  • il peut brouter en bord de route, et traverser juste quand tu te pointes.
  • il peut débouler pleine balle d'une forêt, en troupeau, juste devant. Et là faut prier qu'ils sachent voler en troupeau comme avec le père Noël.


Côté flore, la transition entre la forêt boréale et la toundra se fait poc a poc, petit à petit.

Mais quand même, quel changement de paysage par rapport aux jours précédents. Absolument dépaysant.


Petite pause café.


Toujours sur la E6, les paysages portant à perte de vue me rappellent un peu ceux de l'ouest américain.

Les déserts arides sont remplacés par des arbustes, des mousses, des lichens et quelques petits lacs.

Avec la toundra, c'est plus facile de voir les rennes arriver.


Au soleil de midi, la pluie a pris le dessus, accompagnée du vent glaçant.


La veille, les motards croisés pouvaient se compter sur les doigts d'une main.

Depuis l'arrivée sur la E69, j'en suis déjà à 2-3 paires de paluches.

Quasiment que des trails, beaucoup de GS.

La plupart semblent donc passer par la Suède et la Finlande pour aller et revenir du cap.

Et pas mal de cyclistes et quelques coureurs qui touchent quasiment au but.

Ils m'épatent. Quelle abnégation !

Le NordKapp est un aimant pour l'espèce humaine en quête de défi.


Puis quelques zones de travaux bien boueuses et casse-gueules.

Le genre à serrer les fesses lorsque la moto perd l'adhérence des deux roues.

"Alea jacta est" comme dit Jules.


Entrée dans le tunnel pour accéder à l'île de Magerøya, sous une bonne pluie.

Sortie sous un ciel couvert sec. Yallah !


Il est 14h30, arrivée sur le site du Nordkapp. Trop tard pour profiter de l'entrée gratuite.

Très peu de monde. Au moins je serai pas emmerdé par les allemands ou les chinois.

Les cyclistes sont majoritaires. Respect buddies !


Dans le bâtiment, j'achète un bonnet norvégien Dale parce que :

  • avec mon bonnet en mérino, j'ai froid à la tête quand il y a un vent bien froid comme c'est le cas aujourd'hui
  • mon bonnet en mérino commence à être un peu troué. Mais il fait très bien le job pour dormir dans la tente bien au chaud.
  • à chaque fois que je mettrai ce bonnet du cap, je me souviendrai. De ce qui est arrivé de bons, de moins bons, d'inattendus. De la chance que j'ai eu de faire ce voyage.


Je fais durer le plaisir en repoussant la visite du globe.


La mer, c'est par là ! Et aussi ce que tout le monde attend de découvrir lorsqu'il arrive dans ce coin perdu de Norvège.


Taaaaddddddaaaaaaa !!


Loin au nord, par delà des monts et des rivières, des forêts tempérés et des terres boisées boréales, se dresse un globe solitaire, coincé entre deux espaces étendus vers l'infini et l’au-delà, entre les landes de toundra et la mer de Barents.


Lorsque j'arrive au pied du globe, le peu de personnes qui étaient à proximité ont décampé. Je pensais pas me retrouver seul à seul avec lui. Intimidant !


Au pied de l'escalier, contemplant le sol les marches le globe et le ciel, mon cerveau a basculé en enfance.

Casque à la main, j'ai fait quelques montées / descentes de l'escalier en mode marelle à cloche pied, en fredonnant l'air d'une chanson que j'ai fini par retrouver le soir même.


C'est celle de Nazaré Pereira - La Marelle, avec son air de flute et ses paroles en franco-portugais.

--> Lien


Jogo d'Amarelinha

Na linha naò vai pisar

Pé dentr, pé fora

Esse pé naò vai errar


Le jeu de la Marelle

Va de la terre jusqu'au ciel

Entre la chance et le puits

Tu reviens et c'est fini

...


Encore une réminiscence de l'enfance, décidément la crise de la quarantaine me guette !

L'association d'idées entre cette chanson et le globe me laisse perplexe, faudrait peut-être que j'aille consulter.



Peu après cet épisode de retour en enfance, un gars arrive et le moment est immortalisé.

Bibi & son bô bonnet au gros ponpon


Remi de mes émotions, je zieute si le globe tourne comme le vrai (pour plus de réalisme). Mais non ça n'a pas l'air. En tout cas, l'angle d'inclinaison du globe a l'air correct.


Poursuite de la découverte du coin. D'ici on se rend mieux compte des 300m de hauteur


"Il en faut peu pour être heureux, vraiment très peu pour être heureux

Il faut se satisfaire du nécessaire

Un peu d'eau fraiche et de verdure que nous prodigue la nature..."

Un grand philosophe ce Baloo


Retour dans le site pour voir le petit court métrage qui ressemble à un spot publicitaire sur la Norvège.

Une petite expo sur l'histoire du Nordkapp. Casse pas trois pattes à un canard.


Cap à l'est pour une marche sous une petite bruine. Je verrai où ça mène.


Je vois au loin posé le gars qui m'a pris en photo.

La vue est bien dégagée sur la côte au nord et à l'est de Skarsvåg.


Après 1h30 de marche sous la bruine, je repars en bécane direction Honningsvåg.

Pour fêter ça et la moitié du parcours, ce soir c'est grand luxe messieurs dames.


Je troque le camping pour un hôtel avec une belle vue et spa (j'ai quelques nuits gratuites en stock grâce à mes déplacements pro) et le repas au réchaud par un bon resto. Vu le temps, ça va être cuit pour la vue mais pour le reste...


Petit resto "gastronomique" à Honningsvåg, où je me rends à pied de l’hôtel en gambadant à grande enjambée sous la pluie.

Un bras et demi mais super bon. La rareté fait le plaisir.

Retour sous la pluie de nouveau à grandes enjambées.


Retour à l’hôtel puis un peu plus tard, 1h de spa tout seul en raison du covid.



Étape du jour


A mi-parcours