Samedi 4 septembre 2021


Première nuit du voyage où je mets un réveil. C'est moche.

Au réveil, ça fait bizarre. J'avais perdu l'habitude. Hein ? Quoi ? Faut aller bosser ? 

Ah non, juste choper le ferry vers 8h30. 


Arrivé dans la file pour embarquer, il est 7h45. Je suis le second. Trop en avance.

Je me fais un second café en attendant tout en profitant de la vue.

Le temps est ensoleillé mais des nuages se ramènent au loin.


Un finlandais vient taper la discute, la soixantaine voire un peu plus. Il est en voiture avec sa femme juste derrière Titine.

On papote moto, GS, Nordkapp. Il a une 1200GS et a déjà fait le NordKapp.

Il me dit que Senja est magnifique, c'est pour ça qu'il y revient souvent. Ah ah ça promet.


Bientôt le moment d'embarquer. Le gars de la compagnie me dit de bien sangler car ça va remuer un peu. OK mon gars !


Il est temps de se barrer, car la pluie commence à arriver. Vade retro satanas.


Dans le bateau, j'en profite pour mettre à jour mon journal de bord tout en observant le paysage, et en faisant quelques sorties pour prendre l'air.

Probablement le sud de l'île de Senja :


Les conditions de nav' se durcissent. Ça secoue pas mal, surtout en roulis, un peu en tangage.

La mer d'un côté, le ciel de l'autre. Hop on change de côté.

Tels le flux et reflux des marées, l'histoire se répète inlassablement.

Fin d'écriture du journal, ça commence à me ballonner.


Les portes mal fermées claquent à la fréquence du roulis.

Seules les 2-3 personnes courant gerber aux toilettes viennent perturber cette harmonie.

Je fais le reste du voyage sur un banc du pont arrière à me dodiner en compagnie du bateau et à profiter du spectacle.


Arrivée à Gryllefjord, petit village de pêcheurs, certains sont heureux que cette plaisance finisse. J'avais pris le rythme dommage.

Le village dispose d'un bel emplacement au début du fjord.


Le voici le voilà, le village


Éclaircie d'un côté, nuages généreux de l'autre.

La lumière est vraiment particulière à ces hautes latitudes, plus douce.

Ou alors c'est moi qui me fait des idées. 


A la sortie du village, la route longe la rive sud du fjord. Superbe.

Un pont traverse le fjord, offrant une vue de toute beauté.

Petite pause obligatoire au début du pont où celui-ci est encore sur un lit de grosses pierres


Il y avait une route qui continuait tout droit juste avant le pont avec un panneau voie sans issue.

En regardant maintenant, je viens de remarquer qu'elle permet de faire le tour complet et de grimper le col, évitant ainsi de prendre le tunnel juste après le pont.

Si j'y retourne, j'espère que oui, je le saurai.


Jusqu'à la route de l'Atlantique, les tunnels faisaient un peu l'effet d'un climatiseur, ça apportait de la fraicheur.

Maintenant, ça réchauffe. Peut-être qu'on pourrait y stocker du pinard.


Je quitte la route 86 pour tomber sur l'exquise route 812.


C'est magnifique sur 360°. Le mode panoramique ne suffit pas.

Arrêt au point de vue de Bergsbotn.

J'y mettrai pas ma main à couper mais il s'agit sans doute d'un des plus beaux points de vue de l'ile.


La seule personne que je croise est un allemand en camping-car, la soixantaine.

Bon gaillard super sympa. Retraité, "j'ai tout mon temps" qu'il me dit.

On papote. Il adore la France, il y a travaillé quelques années dans le sud. 

Ça se sent car son français est un peu rouillé.  J'aimerais que mon allemand le soit autant. 


Il me dit : "J'adore la Vendée".

Je lui dis : "C'est pas dans le sud la Vendée".

Lui : "Si, il y fait beau et chaud".

"Ah non tu confonds" je lui dis.

Lui : "Mais si y'a des grands champs".


NDLR : je retranscris un peu pour que ce soit compréhensible, un peu comme les journalistes sportifs lors des interviews de footeux. 


Puis il cherche le nom de la couleur de la Vendée en français. 


Et là je percute qu'il parle pas de la région mais de la fleur : la lavande. 

Je lui montre les photos de ma GS au milieu de la lavande près de Valensole. Paf ça colle.

Je lui explique que la Vendée, c'est pas pareil que la lavande, c'est une région au bord de l'Atlantique, où il pleut tout le temps, et où les gens sont tous palots mais que la région est reconnue mondialement pour ses spécialistes qui font venir la pluie. Crise de rire. 


Lui : 'Tu veux que je te prenne en photo".

Moi : "Non c'est bon".

Lui : "Mais si pourquoi".

Moi : "Bon allez."


Il s'en va. Je vais faire un petit tour sur la plateforme.

Le temps s'est bien dégradé depuis les 15 minutes où je suis arrivé.

La brume et la pluie commencent à rentrer en scène.


Quelques minutes plus tard, je me trouve en bas à observer où je me trouvais voici 10 minutes, maintenant dans la brume.


Un peu plus loin : Tungeneset


La cime des montagnes à proximité est arrondie alors que pour celles au loin elle est très effilée. Curieux.


Je délaisse quelques kilomètres la 862 pour un détour vers Mefjordvær.


De retour sur la 862, mais toujours le long du Melfjord, il est l'heure de grailler.

Le spot remplit les critères : de quoi se poser, jolie vue, pas grand monde.


Le Melfjord mais vu d'en face et d'en haut


En effet, ça grimpe. Gaffe, c'est humide, et il fait moins de 5°C.


Descente sur le Stonnesbotnen puis remontée d'un col avant de redescendre avec une magnifique vue sur le mini village de Husøy.

Désolé pas de photos prises de plus haut.


Petit village de pêcheurs avec une densité de maisons assez forte. 

Je devrais faire plus de photos dans les villages. Je me balade dedans et c'est tout.


Je prends ensuite la direction de Botnham, un peu isolé mais disposant du ferry.

C'est le moment que choisit mon partenaire de voyage depuis quelques jours, la pluie, pour faire son apparition.

Fin de la 862, début de la 861 jusqu'à Silsand, puis route 86 jusqu'à rejoindre la E6.


Sur la E6, c'est de suite moins intimiste. Pour enquiller les kilomètres, c'est pas mal, et avec de magnifiques paysages en bonus.

Les éclaircies reprennent des forces.

Le long du Balsfjorden, juste avant Nordkjosbotn, les sommets des montagnes se font pouponner par les nuages devant mes yeux.


Un peu après, toujours le long du Storfjorden, vue sur les montagnes de Lyngen.

Naïvement, je pense que la montagne s'apprête spécialement pour moi.

Quelles couleurs.


Je continue de rouler le long de Storfjorden, les étoiles dans les yeux et des petits cœurs dans l'âme, petite pause.

Pourvu que ce fjord n'en finisse jamais. Il s'étend à perte de vue.


Sans le soleil, la luminosité baisse fortement.

Étrange impression d'alterner les différents moments de la journée en fonction des nuages : début de soirée / milieu de journée.


Trente minutes plus tard, le long du Kafjorden, un bras du Storfjorden, que la E6 contourne.


Il a fait un peu froid toute la journée.

La moto m'a alerté de risque de givre une grande partie de la journée.

Bien content que l'association poignées chauffantes et gants mi-saisons fasse l'affaire.


Il commence à se faire tard, plus de 19h.

J'ai l'impression que c'est la fin du jour mais que ça dure des plombes.

Entre Sandbukta et Sekkemo, passage d'un col dans un froid piquant avec une atmosphère vraiment particulière.


Dans la montée du col, j'avais la chanson "Virages" d'Yves Duteil dans la tête.

25 ans que j'ai pas dû l'entendre mais elle tourne dans la tête et je me souviens des paroles et de l'air.

Peut-être l'envie d'un bon feu et d'un café ou la réminiscence de l'enfance, quand on partait en vacances en voiture tout minot avec le padre qui conduisait et alternait les cassettes de Brassens, Brel, Le Forestier, Renaud, Nougaro, Cabrel... et Gérard Blanchard avec son fameux Mon amour est parti avec le loup dans les grottes de Rocamadour...


Pour toi public : https://youtu.be/t99PVJwTzNM

Revenons aux affaires :


Sur la descente vers Sekkemo, pas mal d'élevages de saumons croupissant entassés sous le joug humain.


Je trouve un camping à Sekkemo avec un peu de chemin pour y accéder.

Je suis accueilli par une femme qui me prévient de suite : "No room" (Traduction : complet), juste après le bonsoir.

Je lui dis que je voudrais un emplacement pour camper. Elle a cru que j'allais prendre une cabine parce que je suis en GS ou quoi ? 


Il va faire froid cette nuit qu'elle me dit la petite dame.

Je lui dis que ça devrait aller genre gros dur.

Ça se trouve je vais me geler les ouin-ouins, bien comme il faut.

Je verrai bien. J'ai encore de la marge niveau couches chaudes.

Encore le seul campeur du camping. Il est 20h, il fait 1°C.


Tente posée, pas de popote à faire ce soir. J'avais pris un mega pack chez Spar ce matin. Dans les gros Spar et chez d'autres enseignes, parfois il y a des buffets où on peut se servir et blinder des tupperwares en carton plus ou moins gros en fonction du tarif mais super rapport qualité / nutritif / prix.


Ça m'a fait le midi et ça va me faire le soir.

Avec les températures basses, le topcase fait frigo. C'est cool.


Après la mini vaisselle, le brossage de dents, le lavage de raie, il est presque 22h.

Il fait déjà moins de zéro sur le thermomètre de la hutte où il y a les douches.

Il est temps de mettre la tenue complète en merino avant d'aller piauter.


Senja mon petit coup de cœur. Une des plus grandes iles, et une mini Norvège à elle seule.

Des fjords, des lacs, des routes magnifiques, des villages trop jolis.

Des beautés bien cachées, pas facile d'accès, délaissées par les touristes, pas par tous heureusement.

Je regrette déjà de ne pas y avoir consacré plus de temps.

Je n'ai emprunté qu'un petit bout mais quel petit bout .

Difficile de décrire le bien-être ressenti sur cette ile.

"I'll be back", comme le dit si bien Schwarzy.


Quelle journée inoubliable avec ces paysages oniriques aux couleurs pastelles, ces cimes enneigées devant mes yeux, le froid qui piquent gentiment, la beauté de la brume rafraîchissante



Demain le NordKapp !